Consultation publique virtuelle de Patrimoine canadien sur la relance de l’industrie de la production audiovisuelle

Le 16 septembre dernier avait lieu la consultation publique virtuelle de Patrimoine canadien sur la relance de l’industrie de la production audiovisuelle. Cette séance était co-modérée par la présidente-directrice générale de l’Association québécoise la production médiatique (AQPM) Hélène Messier et Reynolds Mastin, président et CEO de la Canadian Media Producers Association (CMPA). Depuis cette rencontre, plusieurs développements ont eu lieu, notamment dans les dossiers des assurances contre la COVID-19 et de la réforme de la loi sur la radiodiffusion

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Dans son introduction, Hélène Messier en a profité pour rappeler que la pandémie avait été particulièrement difficile pour le secteur de la production audiovisuelle, qui était déjà malmené en raison des bouleversements technologiques, des changements dans les habitudes d’écoute et de la perte de revenus publicitaires chez les diffuseurs. Elle a aussi souligné les nombreux défis auxquels fait face l’industrie : l’introduction de plus d’équité dans la réglementation, la lutte pour contrer la déréglementation revendiquée par les radiodiffuseurs,  la contribution des plateformes numériques et celle des fournisseurs de services internet et de téléphonie à l’écosystème de financement, l’injection de nouveaux fonds dans Téléfilm et dans le FMC, de même que la nécessité d’offrir un soutien accru aux créateurs et d’assurer un meilleur reflet des communautés sous-représentées devant et derrière l’écran. Des défis qui, selon elle, « requièrent des actions rapides ». 

Pour sa part, le ministre Guilbeault a reconnu dans son introduction que la crise avait été dévastatrice pour le secteur de l’audiovisuel auparavant en pleine effervescence. Avant de rappeler quelques-unes des mesures mises en place dans les derniers mois, il a évoqué l’importance de « se tourner vers l’avenir », ce qui passe par une augmentation de la demande pour des productions culturelles, une plus grande diversité à l’écran et une réduction de l’empreinte écologique des productions.

Par la suite, quatre panélistes ont été invités à poser des questions au ministre Guilbeault. Du côté anglophone, les interventions se sont concentrées autour des enjeux du réchauffement climatique et de la diversité avec les interventions de Phil Klapwyk, de IATSE Local 891, et de Nathalie Younglai, productrice, scénariste et fondatrice de BIOPIC TV & Films.

La productrice Fanny-Laure Malo a été la première panéliste du côté francophone.

La productrice a tenu elle aussi à rappeler les difficultés encaisséespar l’industrie récemment : la réduction des crédits d’impôt québécois il y a quelques années, la fermeture du programme francophone du Fonds Harold Greenberg, la baisse des revenus d’exploitation dans les marchés traditionnels et la réduction massive des sommes investies par les distributeurs et les diffuseurs qui en résulte, la négociation des ententes collectives ayant menée à une hausse de la masse salariale sur chaque projet et la pandémie qui a paralysé toutes les activités du milieu pendant plusieurs mois. En ce sens, Mme Malo a tenu à préciser que la relance de ce secteur qui représente 180 000 emplois au Canada (dont 47 000 au Québec) et 12,8 milliards du PIB ne doit pas seulement prendre un compte les enjeux liés à la pandémie.

Elle a ensuite voulu proposer des pistes de solution pour assurer la bonne santé du l’industrie dans les années à venir : « Il est impératif de réviser le budget du fonds du long métrage de Téléfilm Canada qui n’a pas été augmenté depuis 20 ans. Pourtant, l’équipe libérale avait promis d’augmenter ce budget de 50 % par année lors de la campagne électorale de 2019. À l’aube de 2021, nous espérons sincèrement que cette promesse sera tenue dès la prochaine mise à jour budgétaire. » Elle a aussi mentionné le budget du Fonds du long métrage du Canada dédié aux productions francophones qui est deux fois et demie plus bas que celui de la SODEC, les mandats que Téléfilm s’est fait confier dans les dernières années sans nécessairement recevoir le budget pour les mener à bien et la diminution des revenus d’exploitation, qui entraîne invariablement une diminution des sommes pour investir dans les projets.

Il faut obliger les géants du web à contribuer au financement du contenu canadien selon un pourcentage de leurs revenus engendrés au pays. Les sommes récoltées devraient aller au Fonds Harold Greenberg ou à un autre fonds similaire afin de financer le développement et la production de longs métrages. Il faudrait également mieux financer le développement chez Téléfilm en augmentant le budget qui lui est dédié, en permettant aux sociétés plus de dépenses admissibles pour sécuriser leur fonds de roulement, et en finançant les étapes qui n’étaient reconnues que par le Fonds Harold Greenberg.

Alors que les Canadiens n’ont jamais autant consommé de contenu sur écrans, la productrice a martelé l’importance de rester compétitifs, ce qui est sera difficile avec des budgets moyens de longs métrages qui n’ont pas augmenté depuis 10 ans par manque de financement. Enfin, la productrice a demandé au ministre Guilbeault s’il était prêt à représenter les producteurs et à aller chercher ces fonds afin d’assurer la relance de l’industrie.

En guise de réponse, le ministre Guilbeault a rappelé que le gouvernement Trudeau a pris des engagements en ce qui concerne Téléfilm Canada, mais qu’en raison de la pandémie, le budget n’a pu être déposé. En ce qui concerne les géants du web, il espère pouvoir déposer un projet de loi sur la radiodiffusion lors de la reprise des activités parlementaires. Il a l’intention, comme le lui a suggéré Mme Malo, d’aller chercher l’argent là où il se trouve. Sans pouvoir donner de date précise, il a dit avoir bon espoir de pouvoir déposer ce projet de loi, volonté qui s’est vue réaffirmée par le discours du Trône prononcé la semaine suivante.

Jenny Thibault, la présidente de Xn Québec a complété la portion de la rencontre réservée aux panélistes. Xn Québec regroupe les principaux acteurs de l’industrie de la créativité numérique du Québec, soit plus de 140 entreprises spécialisées en production de contenus pour différentes plateformes technologiques.

En conclusion, la rencontre n’a comporté aucune annonce significative concernant la révision de la Loi sur la radiodiffusion, l’augmentation du budget de Téléfilm Canada ou le dossier des assurances sur les plateaux de tournage. Néanmoins, Steven Guilbeault a fait preuve de beaucoup d’écoute et s’est montré rassurant en ce qui concerne la volonté du gouvernement Trudeau de soutenir le milieu de la production médiatique. D’ailleurs, une annonce concernant les assurances a été faite quelques jours seulement après un discours du Trône où on a notamment rappelé l’importance de faire contribuer les géants du web au financement de la culture et des médias.