Plainte contre le nouveau programme télévision du Fonds Bell : l’AQPM se positionne

Un regroupement d’intervenants de l’industrie audiovisuelle canadienne a déposé une plainte officielle auprès du CRTC concernant les lignes directrices du nouveau programme télévision du Fonds Bell et d’un apparent conflit d’intérêts dans sa mise en œuvre.  

Dans un mémoire daté du 1er juin 2018, l’AQPM a soumis ses commentaires au Conseil en relevant les préoccupations des producteurs indépendants du Québec à l’égard de ce programme. Selon les directives émises par le Fonds Bell, les projets soutenus par les principaux contributeurs privés que sont Bell, Corus et TVA accèdent à 65 % des montants disponibles. Une part de 20 % est réservée aux autres diffuseurs privés alors que les diffuseurs publics se contentent de 10 % de l’enveloppe. Seules les comédies, les émissions dramatiques et les émissions portant sur les modes de vie sont admissibles. Les documentaires de même que les émissions jeunesse sont exclus du programme.

L’AQPM s’inquiète de l’impact sur la diversité des projets soutenus et de la latitude qui est accordée à Bell, Corus et TVA dans l’attribution des fonds. De plus, la méthode de calcul de la répartition des sommes entre les diffuseurs admissibles crée une iniquité dans le marché de langue française. En effet, la part de dépenses en émissions canadiennes que les télédiffuseurs publics francophones engagent annuellement devrait leur garantir un pourcentage beaucoup plus important des fonds qu’elle ne le fait dans le marché anglophone. L’avantage évident dont profitent les chaînes télé appartenant à Bell Média soulève le doute quant à la présence de conflits d’intérêts entre les contributeurs du Fonds Bell et ses bénéficiaires.

L.AQPM relève également une dichotomie dans les procédures de soumission des projets. Celles-ci sont beaucoup plus exigeantes dans le cas de projets  associés à des diffuseurs autres que Bell, Corus et TVA. La limitation à deux demandes par entité corporative, dans le processus sélectif, contraindra les télédiffuseurs à sélectionner en amont les projets de production, obligeant les producteurs à multiplier les projets et à investir des ressources importantes dans le pré développement de concepts et de scénario susceptibles d’intéresser un télédiffuseur, dont la majorité n’atteindra jamais le stade de la production.

La multiplication des projets entrainera également un accroissement du nombre de documents à fournir par chaque producteur, dans l’espoir qu’un télédiffuseur privé ou public sera en mesure d’inclure un de ses projets dans son quota de demandes autorisées.

Cette complexité pourrait finalement contraindre les producteurs à favoriser les projets destinés à Bell Média et Québecor, qui ne sont pas limités en nombre, requièrent moins de documents, et ne sont pas soumis à un jury de professionnels.

La direction du Fonds Bell a été sommée par le CRTC d’apporter, avant le 22 juin,  des précisions quant à ses règles de gouvernance et à l’élaboration du programme télévision. Le processus de consultation prendra fin le 17 juillet prochain et le Conseil pourra ensuite prendre les décisions en lien avec les représentations effectuées de part et d’autre.